Dans le cadre d’un marché public, la phase préparatoire est souvent sous-estimée, alors qu’elle conditionne directement la qualité de la procédure, la pertinence des offres reçues et, in fine, le succès du projet. Cette phase ne se limite pas à la rédaction du cahier des charges : elle commence bien en amont, dès l’identification précise des besoins et la prospection du marché. Alors, que peut-on faire et que doit-on faire en tant que pouvoir adjudicateur avant la publication d’un marché ?
Définir ses besoins avec rigueur (et lucidité)
Avant de consulter les opérateurs économiques, il est essentiel que le pouvoir adjudicateur clarifie en interne les résultats réellement attendus, les contraintes spécifiques du projet et les objectifs stratégiques ou politiques sous-jacents. Cela implique de prendre en compte les solutions déjà en place, d’en identifier les limites, de mesurer les ressources disponibles (qu’elles soient humaines, techniques ou budgétaires), et d’évaluer le niveau d’ouverture souhaité à des solutions innovantes ou alternatives.
Ce travail d’analyse peut prendre la forme d’une définition fonctionnelle du besoin, d’un diagnostic opérationnel ou encore d’une analyse comparative de solutions déjà mises en œuvre dans d’autres organisations similaires. À cette étape, il est indispensable d’associer les futurs utilisateurs, les services techniques et juridiques, afin de garantir une approche réaliste et partagée.
Analyser le marché économique : ce que vous pouvez faire
Contrairement à certaines idées reçues, le pouvoir adjudicateur a tout à fait le droit – et même l’intérêt – de se renseigner activement sur les solutions disponibles avant de rédiger son cahier des charges. Il peut notamment organiser une étude de marché, se documenter sur des offres existantes, solliciter des démonstrations, rencontrer plusieurs opérateurs économiques, consulter des fiches techniques ou recueillir des retours d’expérience.
Des initiatives comme un appel à manifestation d’intérêt (AMI), une enquête de marché ou une participation à des salons spécialisés sont également envisageables. Ces démarches permettent d’évaluer la maturité du marché, de comprendre les tendances en matière de technologie ou de contractualisation, et de mieux anticiper les contraintes économiques du secteur visé. Cela permet aussi de calibrer les exigences du marché à venir en fonction des pratiques existantes.
Respecter les règles : ce que vous devez faire
Ces démarches préparatoires sont parfaitement légitimes, à condition de ne pas fausser la concurrence ni compromettre la transparence de la procédure. Il est essentiel d’assurer une traçabilité des échanges réalisés avec les opérateurs économiques et de veiller à un traitement équilibré de toutes les parties rencontrées. L’information partagée doit rester neutre et générale : aucun avant-projet de cahier des charges ne peut être transmis à un opérateur avant la publication officielle du marché.
Lorsqu’une consultation préalable a été menée, il est recommandé d’en garder une trace en interne et, le cas échéant, de l’intégrer dans les documents de cadrage du marché, comme le rapport de passation ou une note méthodologique. Aucune disposition de la directive 2014/24/UE n’impose cependant de faire figurer cette information dans les avis publiés ou dans le dossier de marché lui-même. Le pouvoir adjudicateur doit toutefois prendre les mesures nécessaires pour garantir que la participation d’un opérateur à la phase préparatoire ne lui confère aucun avantage indu.
En cas de doute, il est toujours préférable de consulter un expert indépendant ou un conseiller externe afin de sécuriser la procédure tant sur le plan juridique qu’éthique.
Formaliser et préparer
Une fois les besoins et les réalités du marché bien identifiés, la phase préparatoire doit déboucher sur la formalisation d’un cahier des charges cohérent, aligné sur les objectifs du projet. Cela implique de décrire précisément les besoins fonctionnels, de choisir la procédure adéquate (appel d’offres, négocié, dialogue compétitif…), de réfléchir aux critères d’attribution et à leur pondération, et d’envisager le cas échéant un délotage ou l’intégration de clauses sociales ou environnementales.
Il est également pertinent de réfléchir, dès cette étape, aux modalités d’analyse des offres : un bon critère d’attribution découle toujours d’un bon objectif stratégique.
Conclusion
Le succès d’un marché public ne dépend pas uniquement de la qualité des offres reçues, mais bien de la solidité de la phase préparatoire. Mieux définir ses besoins, comprendre son environnement économique, dialoguer de manière transparente avec les acteurs du marché : autant d’actions qui permettent de poser les bases d’un marché réussi, tant sur le plan juridique qu’opérationnel.
Une préparation rigoureuse, concertée et documentée est le meilleur investissement que peut faire un pouvoir adjudicateur pour sécuriser sa procédure et maximiser l’impact de ses achats.
Sources
- European Commission - Guidance on Innovation Procurement
- Public Procurement Portal - Belgian Federal Public Service Policy and Support
- EUR Lex - Directive 2014/24/EU of the European Parliament and of the Council of 26 February 2014 on public procurement – including Article 40 on preliminary market consultations
- EU Publications Office - Explanatory Note on Preliminary Market Consultations
Avec nos experts en marchés publics, Aria Partner vous guide à chaque étape
Chez Aria Partner, nous accompagnons les pouvoirs adjudicateurs à chaque étape du cycle de vie de leurs marchés publics. Lors de la phase préparatoire, notre intervention vise à structurer et formaliser l’expression du besoin, à analyser le marché via des benchmarks, des appels à manifestation d’intérêt ou des entretiens ciblés, et à identifier les risques liés à la procédure pour proposer une stratégie adaptée. Nous assurons également la rédaction des cahiers des charges et des critères d’attribution, en lien avec les objectifs poursuivis, tout en garantissant la sécurité juridique des échanges réalisés avec les opérateurs économiques.
Notre approche repose sur une double expertise : une connaissance approfondie du droit public et une compréhension fine des enjeux de terrain. Que vous soyez une administration locale, une intercommunale ou un organisme parapublic, nous vous aidons à transformer vos contraintes d’achat en véritables leviers d’action publique.
Mieux acheter commence bien avant la publication d'un marché public